Sectes et Sociétés secrètes
LA ROSE+CROIX
Dans notre société matérialiste du fric-roi où l'aspiration générale vise à acquérir toujours plus de richesses matérielles plutôt que d'enrichir ses connaissances ou sa spiritualité, une fraternité initiatique telle que la Rose+Croix peut apparaître utopique et tout à fait anachronique.
Aujourd'hui, le culte du dieu-argent et celui du plaisir immédiat, associés aux démons de la vitesse et de la jouissance, semblent l'idéal de vie de la majorité des hommes. Beaucoup de nos contemporains ont depuis belle lurette jeté aux oubliettes l'existence même de leur âme, oubliant du même coup les aspirations spirituelles et la soif d'absolu qu'elle exige.
La prière, la morale, le respect de la vie, la fraternité, sont des vertus qui font rire.
Chez les intellectuels, la raison pure, la vérité scientifique, ont force de loi. Les spéculations religieuses ou philosophiques impliquant la transcendance ont été rejetées définitivement.
Les mathématiques et la physique, sciences nécessaires, ont chassé la métaphysique, connaissance essentielle.
Pourtant, dans le tréfonds de beaucoup de nos contemporains et surtout de la jeunesse, un fort besoin de spiritualité subsiste, même si dans le contexte ultra-rationaliste qui prévaut, cela prête à sourire, et s'il est malséant d'exprimer publiquement sa foi.
Pis encore, la plupart du temps, lorsque ce besoin se manifeste, il apparaît sous une forme marchande, dévoyée, abâtardie, confisquée par des charlatans dont le commerce est une véritable escroquerie.
Mais, voici qu'en marge de notre société libre, démocratique, profane et hédoniste, nous assistons à la montée des intégrismes, excroissances maladives, véritables cancers proliférant au sein des religions traditionnelles, sous une forme excessive, tapageuse, parfois même séditieuse et criminelle.
Dans ce contexte, les hommes et les femmes intègres qui militent avec foi et abnégation pour une société plus juste sur le plan matériel et plus ouverte sur le plan spirituel, passent souvent pour de doux dingues, des illuminés ou des sectaires marginaux infréquentables par les "bien pensants".
Parmi ces fraternités philosophiques, qui, en marge des religions officielles, prônent le progrès spirituel, l'altruisme et le partage, en s'appuyant sur une tradition ancienne, il y a la Rose+Croix. Elle aborde les problèmes de la vie matérielle, les rapports entre les hommes, les rapports avec Dieu sans sectarisme ni exclusive. Elle propose à l'adepte un chemin initiatique qui le conduira vers une compréhension des grandes questions métaphysiques - qui se posent un jour ou l'autre à chacun de nous -, sans renoncer à la science.
Selon une légende bien établie, la Rose+Croix remonterait au XVe siècle, lorsque une fraternité initiatique se serait constituée autour de la personnalité mythique de Christian Rosenkreutz (vers 1420).
Le personnage que ce nom désigne (en allemand : Croix de Rose), est évidemment purement symbolique. Deux écrits anonymes, parus en 1614 à Cassel, (attribués à Johann Valentin Andreæ) : La Fama Fraternitatis, ou Confrérie du célèbre ordre des Rose-Croix et la Confessio Fratrum Rosae Crucis, accréditent ce conte.
La Fama comporte une biographie imaginaire de Christian Rosenkreutz. Selon cet écrit, ce sage aurait séjourné à Damas avant de fonder, au Monastère du Saint-Esprit en Allemagne, une fraternité chrétienne dont le but était d'atteindre la science universelle par l'illumination intérieure et la mystique.
Cent-vingt ans après sa mort présumée, en 1604, on aurait retrouvé son corps intact, entouré de symboles et de devises initiatiques.
L'histoire ne nous a pas laissé de preuves de l'existence de Christian Rosenkreutz et de son prétendu ordre Rose-Croix. Mais il semble que ces noms personnifient tout un courant ésotérique que Jean-Valentin Andreæ a pris pour modèle de son héros mythique et de sa fraternité idéale.
Dans un manuscrit conservé à Leipzig, Michel Maïer affirme qu'un des "Chapitres" de la Communauté des Mages devint vers 1570, un Ordre des Frères de la Rose-Croix d'Or. En 1598, Simon Stubion crée la Milita Crucifera Evangelica, absorbée au début du siècle suivant par la "Fraternité des Rose-Croix". Il semble que l'origine directe de la Rose-Croix historique date de ce "Chapitre" de Cassel, fondé sous l'égide du comte Maurice de Hesse-Cassel qui comportait une Fraternité officielle et un Collège Invisible.
A Paris, en 1622, un fracassant libelle apparaît, affiché sur les murs :
«Nous, députés du Collège principal des Frères de la Rose-Croix, faisons séjour visible et invisible en cette ville, par la grâce du Très-Haut, vers lequel se tourne le cœur des Justes. Nous, nous montrons et enseignons sans livres, ni marques, à parler toutes sortes de langues des pays où nous voulons être, pour tirer les hommes, nos semblables, d'erreur de mort.»
En apparaissant au grand jour, la Fraternité Rose-Croix, société jusque là fermée et très élitiste, entre dans les controverses et perd de son influence. La plupart de ses membres se fondent dans les sociétés franc-maçonnes qui, d'opératives, deviennent spéculatives et admettent désormais en leur loges des "membres acceptés".
Dans la seconde partie du siècle, la fraternité primitive de la Rose-Croix semble disparaître, absorbée corps et biens par la Maçonnerie. Mais le Collège Invisible subsiste, les Frères retournant aux sources de l'anonymat et du secret.
Si le mariage de la Rose-Croix et de la Maçonnerie fut une réalité incontestable, il semble que cette union profita davantage à la maçonnerie.
Si, au début, de grands adeptes tels Irénée Philalèthe, Elis Ashmole ou les frères Vaughan assurent la prééminence en Angleterre de l'esprit de la fraternité sur celui de la maçonnerie, l'union entraîne peu à peu l'effacement du véritable esprit rosicrucien.
L'idéal utopique et sublime de la Rose-Croix de Jean-Valentin Andreæ ne disparaît pas définitivement avec la mort de son auteur. Au contraire.
En 1710 paraît un ouvrage de Samuel Richter, pasteur luthérien, (nom d'initié: Sincerus Renatus). Cet écrit énumère en 52 articles la déontologie de la Rose-Croix et sa structure.
Quatre ans plus tard, en 1714, Richter crée la Fraternité de la Rose-Croix d'Or, à prédominance alchimique, qui s'unira en 1777 à Berlin, avec une loge maçonnique, devenant la Société de la Rose-Croix d'Or.
Un siècle et demi après son éclosion, la Rose-Croix n'apparaît plus comme un collège de chercheurs théosophes "invisibles" égaux entre eux, mais comme une société secrète, fortement hiérarchisée, à vocation souvent politique. Quelques surgeons conservant l'idéal de la philosophie hermétique primitive apparaissent ici et là, au cours du XVIIe et du XVIIIe siècles.
LA ROSE+CROIX
Dans notre société matérialiste du fric-roi où l'aspiration générale vise à acquérir toujours plus de richesses matérielles plutôt que d'enrichir ses connaissances ou sa spiritualité, une fraternité initiatique telle que la Rose+Croix peut apparaître utopique et tout à fait anachronique.
Aujourd'hui, le culte du dieu-argent et celui du plaisir immédiat, associés aux démons de la vitesse et de la jouissance, semblent l'idéal de vie de la majorité des hommes. Beaucoup de nos contemporains ont depuis belle lurette jeté aux oubliettes l'existence même de leur âme, oubliant du même coup les aspirations spirituelles et la soif d'absolu qu'elle exige.
La prière, la morale, le respect de la vie, la fraternité, sont des vertus qui font rire.
Chez les intellectuels, la raison pure, la vérité scientifique, ont force de loi. Les spéculations religieuses ou philosophiques impliquant la transcendance ont été rejetées définitivement.
Les mathématiques et la physique, sciences nécessaires, ont chassé la métaphysique, connaissance essentielle.
Pourtant, dans le tréfonds de beaucoup de nos contemporains et surtout de la jeunesse, un fort besoin de spiritualité subsiste, même si dans le contexte ultra-rationaliste qui prévaut, cela prête à sourire, et s'il est malséant d'exprimer publiquement sa foi.
Pis encore, la plupart du temps, lorsque ce besoin se manifeste, il apparaît sous une forme marchande, dévoyée, abâtardie, confisquée par des charlatans dont le commerce est une véritable escroquerie.
Mais, voici qu'en marge de notre société libre, démocratique, profane et hédoniste, nous assistons à la montée des intégrismes, excroissances maladives, véritables cancers proliférant au sein des religions traditionnelles, sous une forme excessive, tapageuse, parfois même séditieuse et criminelle.
Dans ce contexte, les hommes et les femmes intègres qui militent avec foi et abnégation pour une société plus juste sur le plan matériel et plus ouverte sur le plan spirituel, passent souvent pour de doux dingues, des illuminés ou des sectaires marginaux infréquentables par les "bien pensants".
Parmi ces fraternités philosophiques, qui, en marge des religions officielles, prônent le progrès spirituel, l'altruisme et le partage, en s'appuyant sur une tradition ancienne, il y a la Rose+Croix. Elle aborde les problèmes de la vie matérielle, les rapports entre les hommes, les rapports avec Dieu sans sectarisme ni exclusive. Elle propose à l'adepte un chemin initiatique qui le conduira vers une compréhension des grandes questions métaphysiques - qui se posent un jour ou l'autre à chacun de nous -, sans renoncer à la science.
L'histoire et la légende
Depuis les Croisades, l'influence de sociétés initiatiques secrètes d'Orient s'étend jusqu'en Occident. A Constantinople (Byzance), où les races et les religions les plus disparates se côtoient, les hermétistes, les alchimistes et les kabbalistes sont très actifs en marge ou au sein même de l'Église. Lorsque l'empire byzantin s'écroule (1453), de nombreux initiés s'intallent en Europe où ils transmettent leur savoir ésotérique à leurs pairs.
C'est l'époque où des initiés prétendent pouvoir fabriquer de l'or à partir du plomb, créer des homuncules, distiller un élixir de longue vie. Par le mystère des transmutations, certains pensent obtenir l'immortalité au travers de perpétuelles métamorphoses.
C'est l'époque aussi des soubresauts de la Réforme et de la Contre-Réforme, où il est dangereux d'exposer tout haut certaines idées. Toute déviation, toute transgression du dogme est considérée comme un crime. L'inquisiteur est à l'affût du moindre aveu extorqué sous la torture. Le bourreau prêt à exécuter la sentence. Dans ce contexte, mieux vaut tourner sept fois la langue dans sa bouche, avant d'exprimer des idées originales.
A travers l'Europe entière, des clercs, des chercheurs, des philosophes, des médecins de différentes obédiences tissent entre eux des liens informels, formant une sorte de société initiatique secrète à l'abri des oreilles indiscrètes. Quelques-uns des plus grands esprits de l'époque semblent avoir adhéré à cette fraternité de grands initiés.
Celle-ci regroupa à la fin du Moyen-Age, des personnalités aussi diverses que Joachim de Flore, Jacob Bœhme, Coménius, Descartes ou Paracelse.
Préfiguration de la "Communauté de Mages" fondée par Cornélius Agrippa, qu'illustreront Robert Fludd, Michel Maïer, l'abbé Trithème ou Henri Khunrath, cette fraternité secrète a des ramifications dans tout le monde chrétien et même au-delà.
Selon Fludd les Frères sont divisés en deux ordres : la plus haute, l'Auraeae crucis fratres abrite les théosophes, les chercheurs en quête d'absolu, qui maîtrisent la théurgie ; la seconde, se compose des Rosae crucis fratres dont les activités se limitent aux choses de ce monde, frères prêcheurs et thaumaturges.
Depuis les Croisades, l'influence de sociétés initiatiques secrètes d'Orient s'étend jusqu'en Occident. A Constantinople (Byzance), où les races et les religions les plus disparates se côtoient, les hermétistes, les alchimistes et les kabbalistes sont très actifs en marge ou au sein même de l'Église. Lorsque l'empire byzantin s'écroule (1453), de nombreux initiés s'intallent en Europe où ils transmettent leur savoir ésotérique à leurs pairs.
C'est l'époque où des initiés prétendent pouvoir fabriquer de l'or à partir du plomb, créer des homuncules, distiller un élixir de longue vie. Par le mystère des transmutations, certains pensent obtenir l'immortalité au travers de perpétuelles métamorphoses.
C'est l'époque aussi des soubresauts de la Réforme et de la Contre-Réforme, où il est dangereux d'exposer tout haut certaines idées. Toute déviation, toute transgression du dogme est considérée comme un crime. L'inquisiteur est à l'affût du moindre aveu extorqué sous la torture. Le bourreau prêt à exécuter la sentence. Dans ce contexte, mieux vaut tourner sept fois la langue dans sa bouche, avant d'exprimer des idées originales.
A travers l'Europe entière, des clercs, des chercheurs, des philosophes, des médecins de différentes obédiences tissent entre eux des liens informels, formant une sorte de société initiatique secrète à l'abri des oreilles indiscrètes. Quelques-uns des plus grands esprits de l'époque semblent avoir adhéré à cette fraternité de grands initiés.
Celle-ci regroupa à la fin du Moyen-Age, des personnalités aussi diverses que Joachim de Flore, Jacob Bœhme, Coménius, Descartes ou Paracelse.
Préfiguration de la "Communauté de Mages" fondée par Cornélius Agrippa, qu'illustreront Robert Fludd, Michel Maïer, l'abbé Trithème ou Henri Khunrath, cette fraternité secrète a des ramifications dans tout le monde chrétien et même au-delà.
Selon Fludd les Frères sont divisés en deux ordres : la plus haute, l'Auraeae crucis fratres abrite les théosophes, les chercheurs en quête d'absolu, qui maîtrisent la théurgie ; la seconde, se compose des Rosae crucis fratres dont les activités se limitent aux choses de ce monde, frères prêcheurs et thaumaturges.
Christian Rosenkreutz (1378-1484)
La légende
Selon une légende bien établie, la Rose+Croix remonterait au XVe siècle, lorsque une fraternité initiatique se serait constituée autour de la personnalité mythique de Christian Rosenkreutz (vers 1420).
Le personnage que ce nom désigne (en allemand : Croix de Rose), est évidemment purement symbolique. Deux écrits anonymes, parus en 1614 à Cassel, (attribués à Johann Valentin Andreæ) : La Fama Fraternitatis, ou Confrérie du célèbre ordre des Rose-Croix et la Confessio Fratrum Rosae Crucis, accréditent ce conte.
La Fama comporte une biographie imaginaire de Christian Rosenkreutz. Selon cet écrit, ce sage aurait séjourné à Damas avant de fonder, au Monastère du Saint-Esprit en Allemagne, une fraternité chrétienne dont le but était d'atteindre la science universelle par l'illumination intérieure et la mystique.
Cent-vingt ans après sa mort présumée, en 1604, on aurait retrouvé son corps intact, entouré de symboles et de devises initiatiques.
L'histoire ne nous a pas laissé de preuves de l'existence de Christian Rosenkreutz et de son prétendu ordre Rose-Croix. Mais il semble que ces noms personnifient tout un courant ésotérique que Jean-Valentin Andreæ a pris pour modèle de son héros mythique et de sa fraternité idéale.
Robert Fludd (1574-1637)
Des clercs philosophes et utopistes anglais comme Thomas More ou sir Francis Bacon, des philosophes comme Joachim de Flore (dont on a dit qu'il fut le prototype de Rosenkreutz) et son disciple Tommaso Campanella, des médecins tel Paracelse, à la fois naturaliste et alchimiste, ou Robert Fludd, des alchimistes mystiques tel Heinrich Khunrath, dont l'Amphithéâtre de la Sagesse éternelle contient l'image d'une rose portant une effigie humaine les bras en croix, véhiculèrent dans leurs travaux et leurs écrits l'esprit de la philosophie Rose+Croix.
Des clercs philosophes et utopistes anglais comme Thomas More ou sir Francis Bacon, des philosophes comme Joachim de Flore (dont on a dit qu'il fut le prototype de Rosenkreutz) et son disciple Tommaso Campanella, des médecins tel Paracelse, à la fois naturaliste et alchimiste, ou Robert Fludd, des alchimistes mystiques tel Heinrich Khunrath, dont l'Amphithéâtre de la Sagesse éternelle contient l'image d'une rose portant une effigie humaine les bras en croix, véhiculèrent dans leurs travaux et leurs écrits l'esprit de la philosophie Rose+Croix.
Les sources historiques
Dans un manuscrit conservé à Leipzig, Michel Maïer affirme qu'un des "Chapitres" de la Communauté des Mages devint vers 1570, un Ordre des Frères de la Rose-Croix d'Or. En 1598, Simon Stubion crée la Milita Crucifera Evangelica, absorbée au début du siècle suivant par la "Fraternité des Rose-Croix". Il semble que l'origine directe de la Rose-Croix historique date de ce "Chapitre" de Cassel, fondé sous l'égide du comte Maurice de Hesse-Cassel qui comportait une Fraternité officielle et un Collège Invisible.
Johann Valentin Andreæ, le père fondateur
Johann Valentin Andreæ (1586-1654)
Au début du XVIIe siècle, la renommée de ce mystérieux et mythique Ordre de la Rose+Croix inspire de nombreux ouvrages dont l'un des premiers et des plus célèbres fut Les Noces chymiques de Christian Rosenkreutz, de Johann Valentin Andreæ, publié en 1616. Les adeptes attribuent généralement la véritable paternité de la philosophie Rose-Croix à cet auteur.
Petit-fils du célèbre théologien luthérien Jakob Andreæ (1528-1590), Johann Valentin Andreæ (1586-1654), se retrouve orphelin de père à l'âge de 15 ans. En compagnie de sa mère et de ses six frères et sœurs, il quitte Herrensberg, sa ville natale, pour gagner Tübingen, ville universitaire, lorsque, épuisé par une route harrassante, il tombe sous les roues de la voiture qui les transporte et demeure infirme pour la vie.
Dès l'adolescence, tout en poursuivant des études de théologie au séminaire de Tübingen, qui le conduiront au pastorat de l'église luthérienne, il se passionne pour les sciences exactes, les sciences naturelles, devient un mathématicien hors-pair et maîtrise aussi bien les langues anciennes que les langues modernes.
En marge de ses études classiques, il s'intéresse également à l'astrologie, à l'alchimie, et généralement à toutes les sciences occultes.
A 18 ans, il écrit les Noces chymiques de Christian Rosencreutz, un texte étonnant, où il livre sous une forme allégorique son grand projet de réforme du monde.
Pendant ses années d'études, Andreæ forge son caractère et noue de solides amitiés avec des personnalités tel Christophe Besold ou Wilhelm Wense, qui ont les mêmes préoccupations philosophiques que lui.
C'est en leur compagnie qu'il produit, polit, façonne, remanie, la philosophie rosicrucienne, dont les trois amis sont, semble-t-il, les pères fondateurs.
En effet, à la fois généreux et utopiste, Jean-Valentin ne se contente pas du luthérianisme officiel. Il rêve d'un monde plus juste, sans mensonge ni hypocrisie, où toutes les richesses seraient partagées équitablement.
Un temps il épouse les idées caritatives et mystiques de Johannes Arndt, dont l'évangélisme pur, intègre et intransigeant, le conforte dans ses propres convictions.
Grand voyageur, c'est en 1611, lors d'un séjour à Genève, que la lecture de l'Imitation de Jésus-Christ, lui révèle le sens réel de sa mission sur terre : "Juvare res christianae", aider la cause du christianisme.
Au début du XVIIe siècle, la renommée de ce mystérieux et mythique Ordre de la Rose+Croix inspire de nombreux ouvrages dont l'un des premiers et des plus célèbres fut Les Noces chymiques de Christian Rosenkreutz, de Johann Valentin Andreæ, publié en 1616. Les adeptes attribuent généralement la véritable paternité de la philosophie Rose-Croix à cet auteur.
Petit-fils du célèbre théologien luthérien Jakob Andreæ (1528-1590), Johann Valentin Andreæ (1586-1654), se retrouve orphelin de père à l'âge de 15 ans. En compagnie de sa mère et de ses six frères et sœurs, il quitte Herrensberg, sa ville natale, pour gagner Tübingen, ville universitaire, lorsque, épuisé par une route harrassante, il tombe sous les roues de la voiture qui les transporte et demeure infirme pour la vie.
Dès l'adolescence, tout en poursuivant des études de théologie au séminaire de Tübingen, qui le conduiront au pastorat de l'église luthérienne, il se passionne pour les sciences exactes, les sciences naturelles, devient un mathématicien hors-pair et maîtrise aussi bien les langues anciennes que les langues modernes.
En marge de ses études classiques, il s'intéresse également à l'astrologie, à l'alchimie, et généralement à toutes les sciences occultes.
A 18 ans, il écrit les Noces chymiques de Christian Rosencreutz, un texte étonnant, où il livre sous une forme allégorique son grand projet de réforme du monde.
Pendant ses années d'études, Andreæ forge son caractère et noue de solides amitiés avec des personnalités tel Christophe Besold ou Wilhelm Wense, qui ont les mêmes préoccupations philosophiques que lui.
C'est en leur compagnie qu'il produit, polit, façonne, remanie, la philosophie rosicrucienne, dont les trois amis sont, semble-t-il, les pères fondateurs.
En effet, à la fois généreux et utopiste, Jean-Valentin ne se contente pas du luthérianisme officiel. Il rêve d'un monde plus juste, sans mensonge ni hypocrisie, où toutes les richesses seraient partagées équitablement.
Un temps il épouse les idées caritatives et mystiques de Johannes Arndt, dont l'évangélisme pur, intègre et intransigeant, le conforte dans ses propres convictions.
Grand voyageur, c'est en 1611, lors d'un séjour à Genève, que la lecture de l'Imitation de Jésus-Christ, lui révèle le sens réel de sa mission sur terre : "Juvare res christianae", aider la cause du christianisme.
Amour et solidarité
Symboles rosicruciens
Sa "Réformation", pamphlet révolutionnaire pour l'époque, sa "Fama", qui pose les premières bases de sa philosophie altruiste sous le couvert de l'histoire mystique de Rosenkreutz, saConfessio qui ouvre très largement les portes d'une véritable fraternité basée sur l'amour et la solidarité des êtres, sont autant de supports historiques qui confirment la mission évangélique du père fondateur de la Rose+Croix.
Mais la vie de Jean-Valentin Andreæ n'est qu'une longue succession de désillusions et de trahisons. Profondément déçu par l'accueil glacial réservé à ses textes fondamentaux sur la Rose+Croix, il reniera le mouvement qu'il avait lancé, l'année même où parurent ses Noces chymiques (1616).
Echaudé par cette Rose-Croix dont personne ne veut et qui finira par se flétrir dès les années 1620, Jean-Valentin imagine une république "christianopolitaine", sorte de nouvelle Jérusalem terrestre, placée sous la protection directe de Dieu.
Un plan social est même rédigé, avec le concours de Wilhelm Wense, et un opuscule imprimé en 1620, envoyé aux quatre coins de l'Europe.
La guerre met fin à ce beau rêve utopiste et les amis se dispersent dans la tourmente et le tumulte des tragiques événements. La plupart des exemplaires de ce "plan" sont à jamais perdus. Seul le titre de l'ouvrage demeure : "La main droite tendue de l'Amour chrétien".
Nullement découragé, Jean-Valentin Andreæ fonde en 1620, une manière de société mutuelle de secours d'ordre local, pour l'aide aux ouvriers, étudiants, malades et pauvres, tout en restant au service de la Haute Mystique, ce qui lui vaudra en 1622, de nouvelles trahisons qui entraînent procès et calomnies.
Il avoua sur le tard avoir inventé de toutes pièces la légende des Rose+Croix.
Véritable Don Quichotte de la Vérité et de la Charité chrétienne, Jean-Valentin Andreæ quitte notre monde le 24 juin 1654, quelques mois après son intronisation comme supérieur de l'Abbaye d'Adelbert.
Curieuse destinée que celle de ce contemplatif qui inventa dans son amour immodéré du Christ et des hommes, une société idéale qu'il fit graviter un temps autour d'un symbole entièrement inventé par lui-même et son cénacle de Tübingen : La Rose+Croix. Mais l'esprit Rose-Croix demeure vivace à travers les siècles et, tel le phénix, renaît périodiquement de ses cendres.
Sa "Réformation", pamphlet révolutionnaire pour l'époque, sa "Fama", qui pose les premières bases de sa philosophie altruiste sous le couvert de l'histoire mystique de Rosenkreutz, saConfessio qui ouvre très largement les portes d'une véritable fraternité basée sur l'amour et la solidarité des êtres, sont autant de supports historiques qui confirment la mission évangélique du père fondateur de la Rose+Croix.
Mais la vie de Jean-Valentin Andreæ n'est qu'une longue succession de désillusions et de trahisons. Profondément déçu par l'accueil glacial réservé à ses textes fondamentaux sur la Rose+Croix, il reniera le mouvement qu'il avait lancé, l'année même où parurent ses Noces chymiques (1616).
Echaudé par cette Rose-Croix dont personne ne veut et qui finira par se flétrir dès les années 1620, Jean-Valentin imagine une république "christianopolitaine", sorte de nouvelle Jérusalem terrestre, placée sous la protection directe de Dieu.
Un plan social est même rédigé, avec le concours de Wilhelm Wense, et un opuscule imprimé en 1620, envoyé aux quatre coins de l'Europe.
La guerre met fin à ce beau rêve utopiste et les amis se dispersent dans la tourmente et le tumulte des tragiques événements. La plupart des exemplaires de ce "plan" sont à jamais perdus. Seul le titre de l'ouvrage demeure : "La main droite tendue de l'Amour chrétien".
Nullement découragé, Jean-Valentin Andreæ fonde en 1620, une manière de société mutuelle de secours d'ordre local, pour l'aide aux ouvriers, étudiants, malades et pauvres, tout en restant au service de la Haute Mystique, ce qui lui vaudra en 1622, de nouvelles trahisons qui entraînent procès et calomnies.
Il avoua sur le tard avoir inventé de toutes pièces la légende des Rose+Croix.
Véritable Don Quichotte de la Vérité et de la Charité chrétienne, Jean-Valentin Andreæ quitte notre monde le 24 juin 1654, quelques mois après son intronisation comme supérieur de l'Abbaye d'Adelbert.
Curieuse destinée que celle de ce contemplatif qui inventa dans son amour immodéré du Christ et des hommes, une société idéale qu'il fit graviter un temps autour d'un symbole entièrement inventé par lui-même et son cénacle de Tübingen : La Rose+Croix. Mais l'esprit Rose-Croix demeure vivace à travers les siècles et, tel le phénix, renaît périodiquement de ses cendres.
La fraternité essaime à travers l'Europe
En ce début du XVIIe siècle, le mouvement hermétique et mystique de la Rose-Croix est très actif à travers toute l'Europe.
Dans la pratique quotidienne, les Frères sont avant tout enseignants et thaumaturges. Ils soignent (et guérissent) sans contrepartie financière.
A Londres, des esprits éminents tels Marlowe, Ben Johnson et Shakespeare, que l'on dit flirter avec le mouvement, se réunissent à la Mermaid Tavern, (Taverne de la Sirène) pour échanger des idées et des propos sur la magie opératoire et l'hermétisme.
Dans la pratique quotidienne, les Frères sont avant tout enseignants et thaumaturges. Ils soignent (et guérissent) sans contrepartie financière.
A Londres, des esprits éminents tels Marlowe, Ben Johnson et Shakespeare, que l'on dit flirter avec le mouvement, se réunissent à la Mermaid Tavern, (Taverne de la Sirène) pour échanger des idées et des propos sur la magie opératoire et l'hermétisme.
Shakespeare et ses amis à la Taverne de la Sirène
A Paris, en 1622, un fracassant libelle apparaît, affiché sur les murs :
«Nous, députés du Collège principal des Frères de la Rose-Croix, faisons séjour visible et invisible en cette ville, par la grâce du Très-Haut, vers lequel se tourne le cœur des Justes. Nous, nous montrons et enseignons sans livres, ni marques, à parler toutes sortes de langues des pays où nous voulons être, pour tirer les hommes, nos semblables, d'erreur de mort.»
En apparaissant au grand jour, la Fraternité Rose-Croix, société jusque là fermée et très élitiste, entre dans les controverses et perd de son influence. La plupart de ses membres se fondent dans les sociétés franc-maçonnes qui, d'opératives, deviennent spéculatives et admettent désormais en leur loges des "membres acceptés".
Dans la seconde partie du siècle, la fraternité primitive de la Rose-Croix semble disparaître, absorbée corps et biens par la Maçonnerie. Mais le Collège Invisible subsiste, les Frères retournant aux sources de l'anonymat et du secret.
Si le mariage de la Rose-Croix et de la Maçonnerie fut une réalité incontestable, il semble que cette union profita davantage à la maçonnerie.
Si, au début, de grands adeptes tels Irénée Philalèthe, Elis Ashmole ou les frères Vaughan assurent la prééminence en Angleterre de l'esprit de la fraternité sur celui de la maçonnerie, l'union entraîne peu à peu l'effacement du véritable esprit rosicrucien.
Tablier d'un adepte titulaire maçon du grade de "Rose+Croix"
Lors de l'explosion de la Franc-Maçonnerie en plusieurs sociétés aux obédiences distinctes, la plupart d'entre elles gardent le symbole Rose-Croix pour qualifier leurs hauts grades, ce qui n'est assurément pas le fait du hasard.
Une légende prétend que les "vrais" Rose-Croix se sont retirés en Orient, trouvant refuge dans le mystérieux royaume souterrain d'Agartha.
Lors de l'explosion de la Franc-Maçonnerie en plusieurs sociétés aux obédiences distinctes, la plupart d'entre elles gardent le symbole Rose-Croix pour qualifier leurs hauts grades, ce qui n'est assurément pas le fait du hasard.
Une légende prétend que les "vrais" Rose-Croix se sont retirés en Orient, trouvant refuge dans le mystérieux royaume souterrain d'Agartha.
L'héritage
L'idéal utopique et sublime de la Rose-Croix de Jean-Valentin Andreæ ne disparaît pas définitivement avec la mort de son auteur. Au contraire.
En 1710 paraît un ouvrage de Samuel Richter, pasteur luthérien, (nom d'initié: Sincerus Renatus). Cet écrit énumère en 52 articles la déontologie de la Rose-Croix et sa structure.
Quatre ans plus tard, en 1714, Richter crée la Fraternité de la Rose-Croix d'Or, à prédominance alchimique, qui s'unira en 1777 à Berlin, avec une loge maçonnique, devenant la Société de la Rose-Croix d'Or.
Un siècle et demi après son éclosion, la Rose-Croix n'apparaît plus comme un collège de chercheurs théosophes "invisibles" égaux entre eux, mais comme une société secrète, fortement hiérarchisée, à vocation souvent politique. Quelques surgeons conservant l'idéal de la philosophie hermétique primitive apparaissent ici et là, au cours du XVIIe et du XVIIIe siècles.